PALIMPSESTE

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C'est qu'on l'haine, Royal ! Partie II/II

L'épisode des "pardons" à l'Afrique et à Zapatero ne fait que confirmer mon analyse. QUI d'autre a provoqué le débat, qui d'autre a fait les couvertures de tous les journaux et invité au 20 heures ? Qui d'autre à part l'autre ? Sondage après sondage elle confirme. Classée meilleure opposante à Sarkozy devant Aubry, Besancenot, Bayrou, Villepin, Strauss Kahn... Elle serait enore au deuxième tour aujourd'hui dans un autre sondage. Son score réduit certes et alors ? Dans le contexte actuel cela a tout d'un exploit. Je m'explique : "aujourd'hui, avec les mêmes candidats qu'en 2007, pour qui voteriez vous pour des élections présidentielles ?" fut peu ou prou la question posée. Or, les électeurs d'aujourd'hui connaissent l'histoire. Nombreux sont ceux qui dans le contexte actuel seraient tentés de voter plus à gauche qu'il ne l'avaient fait en 2007. Le score de Besancenot double et passe à 8%. Seulement voilà, les sondés ne prennent pas le risque inhérent aux présidentielles, ils sont bien sûr dans l'état d'esprit que Royal sera(it) présente au second tour. Nombreux sont aussi ceux qui se placent dans la disposition d'esprit suivante : l'important est de battre Sarkozy, Bayrou est donc l'homme de la situation...donc je voterai Bayrou qui voit son score augmenter quelque peu. Enfin, le sondé socialiste, légitimiste donc aubryiste aujourd'hui a sans doute tendance aussi à se désolidariser de Royal pour un vote écologiste par exemple (Voynet passe à 4% dans le sondage)quitte à se resolidariser au deuxième tour. Malgré cela S Royal réaliserait plus de 20% des voix. C'est son socle. Etrangement le sondage n'a pas été réalisé pour le second tour, pourtant s'il avait été aussi défavorable à Royal, je suis persuadé qu'il aurait fait la une plusieurs jours durant. Je ne suis pas sûr que le socle du PS soit de 20%, je le pense inférieur, on verra bien aux européennes.

Tout ceci, cher lecteur, n'était qu'un prélude à la deuxième partie de notre analyse du cas Royal. Environ 8 Français sur 10 pensent qu'elle sera à nouveau candidate en 2012.
Allons droit au but quitte à étayer plus loin nos affirmations : Ségolène Royal sera sans doute présidente de la République car elle est un concentré du mitterrandisme et du sarkozysme.

Son parcours politique à gauche peut aisément être mis en parallèle avec celui de Mitterrand. Elle provient du centrisme chrétien, Mitterrand venait lui de la droite. Il a conquis la gauche modérée lors des élections de 1964 mais n'avait pu  se  présenter en 1969. Elle a conquis le parti comme Mitterrand de façon brutale et plus ou moins inattendue. Elle suscite de la même façon que lui l'ire de la droite, qui s'estime trahie. Elle utilise des procédés parfois maladroits pour faire parler d'elle : qui se souvient que Mitterrand avait monté un faux attentat contre lui ? Et qui s'en souvenait en 1981? Qui à gauche et au centre ne lui avait pas accordé sa confiance en 1981 et 1988? Les Français aiment avoir le sentiment de partager une même histoire, que la personne soit inscrite dans leur paysage imaginaire et médiatique. Mitterrand s'était construit son histoire de la même façon que Royal le fait aujourd'hui.
Le programme commun PS PC n'est il pas le grand frère d'une alliance avec le Modem ? Je ne suis pas loin de penser qu'un débat Bayrou Royal soit plus sincère et constructif qu'un Marchais Mitterrand.
Ce que n'a pas Royal de Mitterrand (si ce n'est un goût des lettres plus prononcé et une culture classique aussi étendue) elle le tient de Sarkozy. Prenons par exemple le choix du tempo. A la différence de Mitterrand, Royal cherche à occuper l'espace, à tout prix. Elle est la seule à être désormais en capacité de devancer Sarkozy. Prenons le cas d'Heuliez, où elle a fait de cette entreprise un symbole là où Gandrange avait été le symbole sarkozyste. Les excuses à Zapatero constituent un autre exemple : 36 heures après les révélations de Libération, c'est elle qui faisait la une. L'épisode précédant à Dakar, elle avait contraint le PS à se ranger derrière elle, un peu penaud et Aubry à la ramasse.
Par ailleurs, elle dispose de quelques coups d'avance sur la toile depuis la campagne présidentielle.
Surtout, comme Sarkozy, Royal a une liberté considérable dans ses choix et ses propos publics. Ne pas être député fut un choix stratégique probant : en effet, le parlement est si croupion de nos jours, que tout député semble ne plus jouer dans la même cour que les présidentiables. Un député doit donner son avis sur tous les textes de lois et son champ se réduit à cela. Un député ne manie plus des concepts, ou des idées générales, à la télé il donne son avis sur telle ou telle proposition de loi. Un député doit aussi respecter le vote de son groupe à l'assemblée, il ne choisit pas son tempo politique mais est au contraire techniquement soumis au rythme soutenu des examens des textes. Bref, il est soumis à des aléas auxquels S. Royal ne veut et ne doit pas se soumettre. Le résultat de ce positionnement est le suivant : Quand les Français entendent Royal, ils ne s'attendent pas à entendre le PS ou l'opposition parlementaire, ils entendent du Royal. Cette personnalisation (ou privatisation au sens premier) de la vie politique peut se révéler dangereuse mais ce n'est pas le débat ici. Néanmoins, au vu de la présidentialisation du régime et de la vie politique, cette capacité à privatiser le débat constitue un atout certain pour S. Royal comme avait su le faire Sarkozy.
Ce qui est manifeste enfin, chez Royal est cette capacité à apparaître en révolte contre le système. Feinte ou réelle, cette indignation la place à part dans le paysage politique. Elle semble moins disposée au(x) compromis(sions), moins encline à tirer profit de son engagement, plus "pure" dans ses engagements dans la mesure où elle n'est pas une "professionnelle" ou un "éléphant". A la différence de Sarkozy, elle n'est pas le pur produit du système alors qu'ELLE est énarque. Elle n'a pas comme amis la fine fleur du cac 40 et l'ensemble des exilés fiscaux. Elle n'est pas non plus présidente du FMI ou descendante d'une grande famille. Issue d'un parti gouvernemental, elle est imprévisible. Le ronronnement du PS à côté sonne au mieux creux, au pire, faux. Ici, elle rejoint un autre étrangeté de la politique française actuelle, F. Bayrou. Ces deux là jouent aussi cette même carte: alors que tous deux ont grandi au sein du pouvoir, ils s'affichent comme le rempart ultime des dérives de ce dernier.

L'histoire de Ségolène Royal reste encore largement à écrire, personne n'est devin, mais ces parallèles sont, vous l'avouerez cher lecteur, plus que troublants.






03/05/2009
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